Lorsqu’on voyage en VR le long du Saint-Laurent, on va de quai en quai afin d’admirer le fleuve aux grandes eaux sous tous ses angles. Chacun d’eux nous offre une perspective différente, que ce soit du côté du levant ou du couchant.
Les quais du Saint-Laurent ont généralement vécu les grandes heures du cabotage, à son plus fort durant la première moitié du 20e siècle. Une véritable industrie s’était développée autour du transport du bois à pâte, comme l’évoque le grand classique du documentaire québécois Les voitures d’eau de Pierre Perreault (1968). Il ne faut pas oublier non plus qu’à l’époque où les routes ne reliaient pas toutes les communautés du Québec, le transport des biens de consommation et les échanges commerciaux se faisaient essentiellement par bateau, comme c’est encore le cas dans les villages de la Basse-Côte-Nord par exemple. Avec le développement du transport routier, la grande majorité des quais est tombée en désuétude. Un nombre important d’entre eux s’est détérioré au point qu’il n’en reste plus aujourd’hui qu’un empierrement indistinct, comme c’est le cas à Cap-Saint-Ignace (Chaudière-Appalaches) et ailleurs.
Certains de ces quais ont pu être restaurés pour servir à la navigation de plaisance, à la pêche commerciale ou aux traversiers, mais dans la plupart des cas, le seul potentiel envisageable s’est révélé être d’ordre récréotouristique. Alors sont survenus plusieurs problèmes politico-économico-existentiels, les quais étant propriété du gouvernement fédéral qui ne tenait qu’à une chose : s’en défaire. Ce sont les communautés locales qui ont dû assumer leur prise en charge à des couts qui dépassaient souvent leurs capacités. Heureusement, quelques initiatives régionales de mise en valeur ont permis de débloquer des budgets qui donnent aujourd’hui des résultats convaincants. Aujourd’hui, les quais du Saint-Laurent qui ne sont pas disparus sont devenus des points de ralliement touristique incontournables. Des étapes de choix qui constituent pour plusieurs un plan de vacances réussi.
Pour tous les voyageurs avisés qui ont envie d’emprunter au moins une fois dans leur vie les routes côtières du fleuve plutôt que les autoroutes, les quais constituent une succession d’étapes envoutantes. Souvent dotés d’aménagements magnifiques, ils sont devenus des lieux de détente et de piquenique très recherchés en haute saison. Les enfants adorent s’amuser sur les plages qui s’étendent souvent de part et d’autre. On aime s’y perdre dans ses pensées en contemplant l’horizon maritime et cette autre rive mystérieuse qui ne cesse de s’éloigner à mesure que l’on descend le courant.
Le quai des Cageux, à Québec
La ville de Québec a investi de véritables fortunes ces dernières années afin d’édifier plusieurs aménagements grandioses qui mettent le Saint-Laurent en vedette tout en favorisant son accessibilité. La promenade Samuel-De-Champlain constitue le joyau de cette œuvre et le quai des Cageux en est le point névralgique.
Le terme « cageux» désignait les navigateurs qui, au 19e siècle, amenaient de gigantesques radeaux de poutres de pin du nord de l’Ontario et de l’Outaouais jusqu’au port de Québec, où on les embarquait pour le Royaume-Uni.
Le quai des Cageux est fréquenté par des milliers de marcheurs et de cyclistes qui circulent sur la promenade Samuel-De Champlain. À partir de la tour d’observation, ils profitent d’une vue imprenable sur le vieux pont de Québec.
Le quai Paquet, à Lévis
Le quai du Vieux-Lévis, dans le secteur de la traverse Québec–Lévis, a fait l’objet d’un formidable projet de revitalisation. On l’a doté d’une nouvelle gare fluviale et d’une ligne de quai de près de 200 mètres qui accueillera des bateaux de croisière. Le site est directement relié au parcours des Anses, une piste multifonctionnelle pour piétons et cyclistes. On a aménagé sur l’esplanade un spectaculaire jeu de fontaines de 169 jets et, attrait remarquable, on y a mis au jour l’ancien chantier de construction navale qui occupait jadis l’endroit en créant le lieu historique du chantier maritime A.C. Davie.
Il s’agit également du meilleur endroit possible d’où admirer le Vieux-Québec et le Château Frontenac, surtout au lever de soleil.
Le quai de Portneuf, à Portneuf
Le très long quai de Portneuf, avec sa jetée de près d’un kilomètre de longueur, constitue une installation unique sur le Saint-Laurent par sa très grande avancée dans le fleuve. Situé près d’un endroit où les navires doivent effectuer un long virage dans le chenal, il offre un point de vue spectaculaire sur les navires en pleine manœuvre qui semblent s’approcher tout près. La tête du quai est malheureusement à l’abandon, mais l’ensemble de la structure fait partie de possibles projets de développement. Son propriétaire actuel, Transport Canada, le considère en fin de vie alors que la MRC y voit un grand potentiel. Elle espère développer un volet touristique grâce à l’industrie des croisières, la marina, de la restauration, un lienvavec la piste cyclable et la possibilité d’aménager un éventuel centre des découvertes. Il s’agit par ailleurs d’un excellent poste d’observation pour les oies des neiges en saison.
Le quai de Sainte-Angèle, à Bécancour
Une des transformations les plus stupéfiantes parmi les quais du Saint-Laurent, c’est bien celle du quai de Sainte-Angèle, dans la municipalité de Bécancour. Ce grand quai a originellement servi à la traverse entre Trois-Rivières et la rive sud du Saint-Laurent avant l’érection du pont Laviolette. Une tour d’observation illuminée permet d’y admirer tout le front riverain de la ville de Trois-Rivières, avec l’amphithéâtre Cogeco, ainsi que le fleuve à son entrée sur le lac Saint-Pierre. Le coucher de soleil sur le pont Laviolette y est particulièrement spectaculaire. L’endroit est rapidement devenu le point de ralliement de la population locale et des visiteurs qui entrent dans l’arrondissement Sainte-Angèle pour s’y rendre. Pêcheurs et ornithologues y sont particulièrement heureux.
À Saint-Michel-de-Bellechasse
À proximité de Lévis, le long quai de Saint-Michel-de-Bellechasse est d’abord le siège de la Marina et du Club nautique Saint-Michel qui s’avère des plus actifs. Au cœur de l’un des beaux villages côtiers de Chaudière-Appalaches, le chemin d’accès nous présente à l’arrivée la magnifique église et le très beau presbytère patrimonial bordé du cimetière. Au bout du quai, un pavillon invite au piquenique et à la détente en contemplant le mont Sainte-Anne sur l’autre rive. Dommage que la municipalité mène la vie dure aux VR en interdisant le stationnement sur l’ensemble du terrain du club nautique…
À Kamouraska
Le célèbre quai de la municipalité chouchou du Bas-Saint-Laurent, Kamouraska, a subi des transformations majeures au cours des dernières années. D’abord par une restauration importante de l’ancienne structure sur laquelle on a aménagé une promenade, des bancs et des espaces abrités de camping. De plus, on a prévu pour les navigateurs une rampe de mise à l’eau située en parallèle du quai, à quelques pas. L’endroit est très prisé des touristes qui s’y arrêtent au passage en faisant déborder le stationnement. On aime s’y délasser sur le large estran de la plage à marée basse et mettre à l’eau les kayaks de mer à marée haute pour aller jouer autour des iles.
Le quai Boulanger, à Montmagny
Pour ce qui est de l’aménagement d’un point de vue artistique, le quai de Montmagny reste difficile à battre. Le Jardin des Souches, qu’on admire devant les chutes de la Rivière-du-Sud, est une œuvre contemporaine inspirée de la construction navale et de la manutention du bois au 19e siècle. Le quai Boulanger a effectivement été érigé en 1906 afin d’accommoder les goélettes qui transportaient alors le bois. Aujourd’hui, il accueille également la gare fluviale, son service de traversier vers L’Isle-aux-Grues et le bureau d’information touristique. Mais on apprécie surtout le magnifique parc de la Promenade du Bassin, un espace vert bucolique et calme, à proximité de la ville et du camping Pointe-aux-Oies.
Les quais de Tadoussac
Dans un village aussi petit que Tadoussac, on trouve deux quais d’importance à cause de sa position stratégique à l’embouchure du fiord du Saguenay et de l’estuaire du Saint-Laurent. Celui de la traverse vers Baie-Sainte-Catherine n’a rien de pittoresque, pas plus que son voisin situé dans la baie de Tadoussac. Ce qui y attire des centaines de milliers de touristes, c’est naturellement le fait que le second est le point de départ de nombreuses croisières aux baleines. Son environnement naturel demeure l’un des plus spectaculaires au monde, surtout quand on le contemple du plateau du Camping Tadoussac. Il faut absolument emprunter le sentier du parc national du Saguenay–Saint-Laurent sur la pointe de l’Islet… pour se balader d’un quai à l’autre.
Le quai de la traverse, à Saint-Siméon
Un des quais de traversier les mieux connus des voyageurs, c’est celui de Saint-Siméon, en Charlevoix. Les campeurs apprécient la magnifique plage de sable qui borde le quai et où se trouve un terrain de camping très populaire. On aime s’y promener sous le soleil ou dans le brouillard, en suivant l’aller-retour du bateau-passeur qui amène à Rivière-du-Loup, où se trouve un autre quai intéressant, point de départ d’un superbe parc riverain et de sa piste multifonctionnelle.
Plus que centenaire, le quai de Saint-Siméon était autrefois fréquenté par les pêcheurs d’éperlans et la jeunesse locale qui venait y virer en auto… Une tradition qui ne se perd sur aucun des quais du Québec.
À Port-au-Persil
Le quai de Port-au-Persil, dans Charlevoix, se révèle l’un des lieux de pause les plus agréables qui soient. Les attraits de ce quai et de son hameau sont multiples. Le quai lui-même, complètement restauré, s’avère irrésistible avec ses chaises, ses bancs, ses tables et ses lampadaires. Fondé il y a deux siècles par un Écossais, Port-au-Persil a conservé de magnifiques exemples de son patrimoine architectural, dont sa petite chapelle de 1902, incroyablement photogénique. En été, les enfants adorent glisser sur les pierres lisses de la chute voisine. On y trouve un débarcadère.
Au Petit-Saguenay et à Saint-Gédéon
En terminant, éloignons-nous du Saint-Laurent pour mentionner deux quais à ne pas manquer. Celui de Petit-Saguenay, dans le Bas-Saguenay, a fait l’objet d’un réaménagement exceptionnel. Il se trouve à l’extrémité du plus long droit sur le fiord du Saguenay, là où le soleil se couche en plein milieu du fiord au début de l’été. Dans la région du lac Saint-Jean, le quai de Saint-Gédéon, sur le rang des Îles, demeure un secret bien gardé. Accessible par la Véloroute des Bleuets, le point de vue sur le lac, ses iles et, surtout, le coucher de soleil, y sont éblouissants.