Qualité des VR
14 décembre 2025
J’ignore si vous avez visionné le reportage de l’émission La Facture diffusé le mardi 2 décembre, on y abordait une question cruciale, celle de la qualité des VR fabriqués aux États-Unis. Personnellement, j’ai beaucoup aimé, mais tout en reconnaissant le grand professionnalisme de l’équipe l’ayant préparé, j’en suis sorti plutôt déçu, beaucoup même.
Alors que le menu laissait présager un festin devant lequel on aurait aimé s’attabler confortablement pendant des heures et tout savourer, j’en étais réduit à m’empiffrer comme on dévore un minable et petit hamburger servi dans une bicoque de restauration rapide. Presque pas le temps de s’asseoir qu’il faut quitter la place.
Le premier commentaire ayant atterri sur mon ordinateur dans l’heure qui suivit la diffusion disait simplement : J’en aurais pris encore, beaucoup plus ! Je n’étais donc pas le seul à être resté sur ma faim.
Même si, l’entrevue accordée et l’ensemble du tournage ont nécessité plusieurs heures étalées sur deux jours — et ça, sans tenir compte de celles consacrées à la recherche, aux vérifications et contrevérifications —, j’ai été soufflé par le peu de phrases conservées dans tout ce que j’avais dit. Heureusement, un montage de qualité supérieure, très habilement fignolé, permit d’éviter le danger de fréquentes dérives associées à des bouts de phrases sortis de leur contexte.
Je me permets donc aujourd’hui de revenir sur certains de ces propos que j’aurais aimé entendre sur les ondes lors de la diffusion. Ce ne sera pas, bien sûr, le verbatim de ce qui s’est dit, mais seulement quelques précisions qui vous permettront de mieux comprendre l’angle que j’avais en accordant cette entrevue.
En premier lieu, j’ai beaucoup insisté sur le fait que la faible qualité de fabrication des VR provenant des États-Unis ne pouvait être généralisée ni appliquée à ceux qui sortent des ateliers québécois et canadiens. Personnellement, je vois plusieurs raisons pouvant expliquer cette différence.
La première tient au fait que les fabricants canadiens se spécialisent dans un segment très délimité de véhicules récréatifs. En fait, les seules autocaravanes fabriquées au Canada se retrouvent dans la niche très pointue des VR de classe B ou B+, à l’exception de deux entreprises québécoises, Safari Condo et Prolite, qui œuvrent aussi dans le segment des petites caravanes de voyage.
Plutôt que de se disperser dans des dizaines de modèles et de marques de toutes sortes, nos compatriotes concentrent leurs efforts pour optimiser une qualité de fabrication dont dépend grandement la survie dans le milieu aussi achalandé et hautement concurrentiel que celui du VR.
Cette lutte pour se tailler une place met aussi la barre haute aux très petits ateliers qui, souvent, se limite à une seule plateforme de fourgonnette, qu’ils réussissent à diversifier en proposant un, deux ou trois plans d’aménagement intérieur. Souvent confrontés à un budget serré, il leur est difficile de se lancer dans une coûteuse campagne publicitaire. Leur marketing repose donc en grande partie sur un bouche-à-oreille alimenté par leurs premiers clients, et ce, pourvu qu’ils soient satisfaits du produit.
Ce genre de publicité présente cependant un énorme risque. Autant il peut être bénéfique par l’accumulation de témoignages positifs, autant quelques commentaires formulés par des clients, dénonçant une fabrication bâclée ou la mauvaise qualité des accessoires et matériaux utilisés, peuvent les conduire au bord du gouffre. La survie de ces entrepreneurs repose donc sur la constance et l’excellence de leurs réalisations.
Qu’ils soit petits ou plus gros, comme Leisure Travel Van, Safari Condo ou Montecarlo, les fabricants et aménageurs canadiens s’attaquent au même segment du marché, ce qui signifie que tous les modèles sortant de leur usine intègrent sensiblement les mêmes appareils, accessoires et réservoirs. Pour se démarquer des concurrents, ils arrivent à ajouter une touche personnelle en misant sur design intérieur distinctif et un choix judicieux des matériaux utilisés.
Dans un contexte aussi restrictif, la qualité du travail devient alors d’une importance majeure. Heureusement, plusieurs des manufacturiers canadiens sont des entreprises familiales, dont la croissance s’étale souvent sur plusieurs générations. La passion et les valeurs des fondateurs amènent généralement l’implantation d’une culture d’entreprise où les employés sont davantage perçus comme des collaborateurs à la fabrication, plutôt que de simples exécutants. Ce type de relation suscite presque toujours un sentiment d’appartenance et de respect qui les rend fiers des produits fabriqués. Et la qualité ne peut que mieux s’en porter !
Lors de l’entrevue, la journaliste m’a aussi demandé s’il pouvait exister des moyens, des solutions à la piètre qualité des véhicules fabriqués aux États-Unis. Malheureusement, ma réponse ne survécut pas au montage. Plutôt que de reprendre ici ce qui fut ignoré dans la version finale du reportage, je vous suggère de lire ou relire l’éditorial que j’ai publié dans le numéro de décembre de Camping Caravaning.
Plus que jamais, je considère que le moment est on ne peut plus opportun pour amener en Amérique des véhicules récréatifs venus d’Europe. Parlez-en à des caravaniers qui ont voyagé sur l’ancien continent et vous verrez leur engouement pour l’ingéniosité, le design, la qualité d’assemblage et de fabrication, mais surtout le prix raisonnable de ceux-ci ; d’autant plus que le prix de détail suggéré par le fabricant incorpore déjà, selon le pays, entre 19 et 22 % de TVA (taxe sur la valeur ajoutée, l’équivalente européenne de nos TPS-TVQ).
Non seulement nos caravaniers seraient des plus heureux, mais ces véhicules auraient aussi un impact majeur sur toute l’industrie étatsunienne du VR. Du jour au lendemain, concurrence oblige, celle-ci se verrait forcée de revoir la qualité de ses produits, ce dont profiteraient l’ensemble des amateurs nord-américains de caravaning.
Notre gouvernement pourrait alors échapper, pour ce secteur de l’activité économique, trouver une façon d’esquiver des tarifs douaniers aussi exorbitants qu’insensés et de faire un beau pied de nez au petit monsieur.
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