La qualité des pneus des véhicules récréatifs tractés, les caravanes, par exemple, constitue sans contredit leur talon d’Achille et l’élément pouvant le plus mettre en péril la sécurité des VR et de leurs usagers. Pourtant, une surveillance minutieuse des diverses composantes du VR à toutes les étapes d’un voyage devrait permettre de découvrir des défaillances potentielles avant qu’elles ne se transforment en catastrophe. L’exemple décrit dans cet article en est probant.
Ayant travaillé au cours des 38 dernières années dans le domaine de l’aviation, je reste ébahi par le haut de niveau de sécurité atteint par cette industrie. On dit que la probabilité d’avoir un accident d’avion et d’en mourir serait aussi basse que celle d’être frappé par la foudre. Ce succès résulte de l’implantation et de l’application continue de normes et procédures très strictes d’inspection, d’entretien et d’exploitation des aéronefs. Les listes de vérification constituent un outil privilégié de l’industrie. Des systèmes de gestion de la sécurité (SGS) sophistiqués ont été mis en place afin d’assurer qu’aucune défaillance ne passe à travers les lignes de défense et n’aboutisse à un accident. La sécurité y est devenue la priorité
absolue.
Cette attitude envers la sécurité devient en quelque sorte une seconde nature facilement transposable à l’utilisation sécuritaire d’un véhicule récréatif, pourvu que l’on s’en donne la peine. Il suffit de demeurer le moindrement vigilant et d’aiguiser son sens de l’observation pour noter tout changement et, le cas échéant, agir avant qu’il ne soit trop tard.
L’industrie du VR reconnait que les pneus constituent l’un des éléments des véhicules récréatifs tractés les plus sujets à défaillance. Étant adepte du caravaning depuis près de 30 ans, j’ai entendu une multitude d’histoires d’horreur relatives aux pneus des VR tractés. En fait, presque tout le monde connait quelqu’un qui a déjà subi une crevaison ou l’éclatement d’un pneu de caravane.
De façon générale, les experts s’entendent sur les cinq principales causes de défaillance des pneus des véhicules tractés :
• le gonflement insuffisant des pneus, qui peut en provoquer la surchauffe ;
• l’âge des pneus ;
• la surcharge des pneus ;
• le fait de ne pas effectuer la rotation des pneus ;
• les rayons ultraviolets et l’ozone.
À ces causes, on pourrait aussi ajouter le fait que beaucoup de caravaniers roulent à des vitesses excédant la capacité des pneus. La plupart des pneus de caravanes sont en effet cotés pour une vitesse maximale de 110 km/h.
Revenons maintenant, à l’aide d’un exemple réel, aux principes de sécurité mentionnés précédemment et à leur applicabilité au monde des VR.
Étant propriétaire d’une caravane à deux essieux, j’utilise toujours des cales de roues pour empêcher la caravane de se déplacer une fois installée sur un emplacement de camping. Ces cales s’insèrent entre les deux roues de chaque côté de la caravane.
Un jour, lors de l’installation des cales, j’ai remarqué que je n’arrivais plus à en installer une entre les pneus du côté droit de la caravane. Pour y arriver, je devais desserrer au maximum la vis sans fin de la cale. Instinctivement, je savais que cette situation n’était pas normale, car la distance entre les deux pneus s’était subitement réduite. J’ai rapidement conclu que cette situation commandait une « enquête » plus approfondie, pour utiliser le jargon de l’aviation. Il fallait trouver la cause de la situation. Un des deux essieux se serait-il déplacé ? Une vérification détaillée du dessous de la caravane et la prise de certaines mesures ont rapidement permis d’écarter cette hypothèse. La distance entre les centres des roues n’avait pas changé et elle était identique des deux côtés de la caravane.
Un pneu pourrait-il être en cause ? Comme la situation était apparue subitement et non graduellement, l’usure des pneus a aussi pu être éliminée des causes possibles. Une vérification attentive de la semelle des deux pneus a permis de noter une différence significative dans la forme de celles-ci. La semelle du pneu arrière était nettement plus bombée que celle de l’autre pneu. La comparaison avec les deux pneus à gauche a également permis de constater que seul ce pneu était différent des trois autres. Les photos ci-jointes illustrent cette différence. Le fait que la semelle était bombée augmentait le diamètre et la circonférence du pneu, réduisant de près de 2,54 cm la distance entre les semelles des deux pneus, d’où l’impossibilité d’installer la cale sans en modifier l’ajustement.
N’étant alors qu’à une cinquantaine de kilomètres de ma résidence, mon analyse de risque (autre terme d’aviation) m’a permis d’établir que le risque était acceptable. J’ai pu revenir chez moi à la fin de mon séjour de camping en limitant légèrement ma vitesse.
La consultation subséquente d’experts en pneus a confirmé que le symptôme apparu sur la semelle du pneu annonçait probablement un début de défaillance de la bande de roulement. En toute probabilité, cela aurait éventuellement conduit à une désintégration ou à un éclatement sur la route. Ces incidents provoquent souvent des dommages collatéraux importants aux VR, en plus d’augmenter le risque d’accidents routiers.
Cet exemple démontre sans équivoque la nécessité de demeurer en tout temps à l’affut de toute défaillance potentielle lors de l’utilisation d’un VR tracté et de réparer ou de remplacer les pièces défectueuses avant que la situation ne mène à une catastrophe. Tout changement subit de l’état ou du comportement de l’équipement doit immédiatement déclencher une analyse de sa cause et la définition de mesures correctives, avant que la situation ne dégénère. De nombreux incidents vécus par les caravaniers pourraient ainsi être évités.